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24 juillet 2008 4 24 /07 /juillet /2008 00:00
Un peu d'officiellement léger aujourd'hui, pour changer des articles pseudo-poétiques ou pseudo-engagés. Du léger et sans doute du vécu pour beaucoup...

Paris, musée du Luxembourg, pour l'exposition Vlaminck il y a quelques semaines, guidé par une amie (on dit que l'amitié entre un homme et une femme n'est possible qu'avec les exs et les râteaux. Devinez dans quelle catégorie se range ma belle guide et vous gagnez votre poids en pensées malsaines).

Je me perds dans le dédale des cloisons blanches posées ça-et-là pour former un parcours initiatique improbable, enivré par la profusion de couleurs des tableaux, la poésie surréaliste des citations peintes en lettres d'or aux murs, la chaleur fauve des visiteurs badaudant à mes côtés, et le cul appétissant de la gardienne.

Ndlr : C'est en relisant cette phrase pathétique que La part de l'autre prit définitivement conscience de sa pitoyable condition. Il décida alors, dans un paradoxal réflexe de survie, de se jeter sous un bus. Celui-ci l'évita malheureusement. La part de l'autre comprit que la vie avait décidé de jouer avec son existence minable et partit garder des chèvres dans les plaines du Pakistan. Il dut s'enfuir deux semaines plus tard après avoir été surpris en plein ébat zoophile par un autochtone et condamné par les autorités locales à la prison à vie. De retour dans sa contrée, il se résigna à terminer cet article.

Après plus d'une heure de déambulage (non, ca n'existe pas) dans l'expo, ma chère guide et moi-même décidons de couper court à la vague fauviste dans laquelle nous nous ébattons pour retrouver l'air pur de Paris. C'est sans compter l'inconfort qui m'atteint depuis maintenant de longues minutes : une vessie qui crie au tsunami. Ne voulant admettre qu'à moitié ma faiblesse, j'indique d'un air nonchalant à ma boussole artistique que « Tiens, je vais passer par les cagoinces avant de partir ». Etant sans doute aussi torturée par sa vessie que moi, elle me répond d'un air tout aussi nonchalant que « Ah ben tiens moi aussi ». C'est sur ces timides entrefaites que nous nous enfonçons dans les profondeurs du Luxembourg à la recherche de la providentielle vasque d'aisance.

En arrivant aux gogues, j'ai la non-surprise de voir un homme immobile contre une vespasienne, en position de soulagement, arme au poing. Normal, si ce n'est que pendant tout mon trajet depuis la porte jusqu'à l'orifice qui me soulagera, l'homme reste désespérément incapable de pisser, se contentant de mater le carrelage devant lui. Je m'en gausse intérieurement, comprenant totalement ce pauvre type, incapable de se relâcher lorsque quelqu'un est dans la pièce, d'autant que j'ai généralement le même problème. Mais vu l'envie qui m'assaille (comme on dit à Nairobi), ça n'est pas un timide de la lancequine qui va m'arrêter et je lui fais même l'outrage de choisir la pissotière attenante à sa position, comme pour lui asséner le coup de grâce.

Sauf que la vie, à l'image de quelques unes de mes exs, est une vraie chienne ayant décidé de me sucer jusqu'à la moelle. Me voici donc, la bite à la main, avec l'envie qui me ronge mais la pudeur qui me bloque, et à défaut de trouver quoi que ce soit d'intelligent, je me mets à mater moi aussi le carrelage devant moi.

Les pensées qui me traversent relèvent alors de la stratégie militaire. D'abord faire l'inventaire de ses forces : une vessie pleine mais qui ne se videra d'aucune manière dans la présente situation. Ensuite jauger l'ennemi : un homme ayant le même problème que moi, mais plus mal à l'aise puisqu'il est dans cette situation depuis plus longtemps que moi. Je viens à peine de sortir mon engin, donc il ne sait pas encore que je suis en difficulté. Mais cet avantage sera perdu dans 3... 2... 1... Ca y'est, il a compris, nous sommes à égalité. Non, c'est même lui qui a l'avantage : il a compris que je suis dans la même merde que lui, et qu'en plus j'ai préjugé de mes forces en me postant à son bord immédiat. Pour résumer cette analyse de l'existant, je sais, il sait, je sais qu'il sait, il sait que je sais, je sais qu'il sait que je sais, et il sait que je sais qu'il sait.
Examinons maintenant les échappatoires : vu que mon assaillant et moi-même savons, il n'est évidemment plus question de tromper l'autre, mais bien d'en sortir le moins minable possible. La première chose qui fuse dans ma tête est l'évidence que je dois impérativement bouger avant lui. Mais, tel votre pote bourré venant vous toucher les couilles alors que vous parlez à une jolie pouf dans un but pornographique, plusieurs autres options viennent me déconcentrer. Je me dis que je pourrais très bien fermer les yeux et m'imaginer au fond d'un trou, oublier la compétition qui fait rage entre moi et le non-pisseur impassible, et le laisser gagner. Je me dis aussi que je pourrais tenter la ruse la plus improbable qui soit, à savoir faire semblant de pisser comme si de rien n'était. J'avais d'ailleurs usé avec succès de cette feinte lors d'un précédent affrontement, mais le bruit du lieu avait alors permis de couvrir le silence de mon non-soulagement qui m'aurait trahi. Sauf que cette fois, les lieux sont rigoureusement silencieux. De plus, je sens sur Line (je l'appelle Line, et vous ?) le regard narquois du connard d'à coté. C'en est trop, il est temps de passer à l'action.
En moins de temps qu'il n'en faut à votre femme pour écrire un texto à son amant, j'échafaude et exécute mon plan. D'abord, grogner. Non pas pour effrayer l'adversaire, mais pour asseoir mon emprise et récupérer l'avantage. Ce grognement envoie au bloqué de la vessie un message on-ne-peut-plus clair : « Je n'arrive pas à pisser, j'en suis conscient, je l'assume, et je t'emmerde ». Bloqué mais lucide, mon challenger ne peut que se prendre l'effroyable vérité de ma suprématie en pleine face, et me manifeste sa soumission en continuant à regarder le carrelage en face de lui. Dans un deuxième temps, je range Line dans son antre, non sans lui adresser un regard réprobateur. Puis je quitte mon confessionnal d'un pas sûr et autain.

Mais je me retrouve nez-à-nez avec le dernier obstacle qui me sépare de la victoire : le lavabo. Se laver les mains, c'est laisser à l'adversaire la chance de penser que j'ai tenté de lui faire croire que j'avais pissé quand même. Ne pas se laver les mains, c'est passer pour un porc. Je prends surtout conscience que c'est l'hésitation qui pourrait me faire perdre la partie, alors je décide que je l'emmerde, et je me lave les mains. Longtemps. Très longtemps. Parce que voyez vous, depuis tout ce temps, mon collègue d'infortune (on finit toujours par éprouver de la tendresse pour son perdant) n'a pas bougé, et je finis par me demander quelle était sa stratégie depuis le début, depuis le moment où il m'a entendu arriver et qu'il a compris qu'il ne pourrait se soulager. Alors je prends mon temps, et je le contemple dans le miroir, immobile, concentré sur son carrelage. Il finit par me faire de la peine, mais comme je suis un connard, je prolonge ses souffrances en me séchant les mains pendant plusieurs minutes.

Et puis finalement, je m'en vais, victorieux mais triste de ne connaître la fin pour mon challenger, et surtout encore torturé par mon envie pressante. Un dernier regard par dessus l'épaule quand j'arrive à la porte : il n'a toujours pas bougé. Je me demande qui a l'air le plus con.

Pour les curieux, mon envie connaitra sa fin dans les toilettes de l'UGC des Halles, avant la projection d'Indiana Jones, le blockbuster commercial, mais en VO, comme ca, pour dire de ne pas faire comme tout le monde. On ne se refait pas...
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commentaires

D
<br /> Hello, ici De, de Twitter!<br /> <br /> <br /> Magnifique, j'ai ri, beaucoup!<br /> <br /> <br /> j'avoue que les toilettes pour hommes m'ont toujours semblé un lieu très étrange et sans pudeur, et je me suis souvent demandé comment c'était, d'en être.<br /> <br /> <br /> Et bêtement, je ne pensais pas que c'était possible d'être bloqué de l'urination. (bien que, en tant que fille, j'ai le problème pour la cacatation) <br /> <br /> <br /> Come dirait la demoiselle au-dessus, "continue ainsi" ;)<br />
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L
<br /> <br /> Merci pour le commentaire. Mais veuillez employer des mots dico-compatibles. Ce blog à un certain standing, merci ;)<br /> <br /> <br /> <br />
L
Ca fait plusieurs semaines que je te lis et je tenais à te dire que ton blog est une vraie merveille pour les filles.Moi qui me suis toujours demandée (comme beaucoup) ce à quoi les mecs pouvaient penser, voilà un bon échantillon de leur activité cérébrale.Je suis une de ces filles que tu gratifies de doux noms tels que "salope ou pouf " ... Et bien que ton discours mysogine aurait de quoi m'énerver, je le trouve lucide et honnête. Mais surtout il me donne un aperçu plutôt fiable de la triste réalité des rapports que j'entretiens avec la gente masculine.Bref, continue ainsi, tu m'éclaires.
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L
Moi je releve le défi. Avec La part de l'autre et Mini Moi on peut reussir a tenir longtemps même en sifflant "le pont de la riviere Kwaï"... bon faudra trouver des Water avec des hauteurs différentes pour qu'on puisse jouer en meme temps (page 2549 du tome 3 pour ceux qui comprendront).
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M
RATEAUX!!!!!!!!!!<br /> Et pour le reste, deja vecu et pas tres agreable...Une chose est sur...je n'irais jamais pisser avec toi a cote...
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L
<br /> Je ne donnerai pas la réponse à ma question. Je préfère laisser les esprits s'échauffer.<br /> <br /> Au moins maintenant, chaque fois que tu iras visiter des toilettes publiques, tu penseras à moi...<br /> <br /> <br />

Boussole